30ème anniversaire du jumelage à Wackernheim: impressions d'un Daixois

Afin de s’assurer, 8 Monate plus tard, que la mémoire ne fait pas défaut, BERNARD bittet mich zu schreiben en « französischer Sprache » mon souvenir de notre séjour de l’Ascension dans votre Bourgade...

 

Donnerstag

Au travers des vitres du bus, nous voyons les vergers de cerisiers, de pruniers, d’abricotiers. Nous savons que nous approchons.

Au rond-point d’en haut, les drapeaux de nos 2 pays flottent ensemble dans le vent. Ils nous indiquent que nous sommes sur la bonne route, celle qui conduit chez des amis.

À droite, nous prenons une rue étroite, en pente. A gauche, il me semble reconnaître la maison de la KELLER Familie. Nous sommes après quelques manœuvres de bus sur la place du Rathaus. Un groupe de visages joyeux, souriants, nous y attend.

A l’arrière du bus, les jeunes footballeurs se disent, ouf ! – Ils regardent déjà vers les stands de la fête et retrouvent les visages de leurs copains de WACKERNHEIM, ceux qui étaient venus l’année dernière camper à DAIX et jouer au foot sur le stade du village.

SYBILLE & ACHIM nous prennent dans leurs bras, nous embrassent, et disent à CORINNE, combien ils sont heureux qu’elle soit là « zu Hause » pour la « KERB ! ».

Une main à serrer ici, une autre là, une bise, 2 bises, guten Tag, gut gereist, wilkommen, hallo ! « aaahhh Dominique… »… Wir sind chez notre Austauschpartner.   

WACKERNHEIM est décoré, les maisons arborent eine grosse Fahne à chaque fois différent, mit allen Farben. À peine le temps de saluer la dame en bronze sur la place, nous prenons la Strasse d’unser deutsches Haus du week-end.

SYBILLE me demande : "kommst Du mit mir", (es ist ihr Geheimnis), pour lire le discours qu’elle prononcera tout à l’heure afin de souhaiter la bienvenue aux Daixois. Comme chaque année, son texte est parfait, elle me demande simplement de retrouver 2 à 3 expressions françaises rigolotes dont elle ne se souvient plus tout à fait… Me voici au rang de conseiller personnel de mon amie la Bürgermeisterin pour les discours aux Français… Pourvu qu’elle n’en parle pas à Angela…!          

Réception. La salle est couverte de couleurs assemblées du jaune, rot , blau, weiß, schwarz, ein kleiner Regenbogen. Les élèves du lycée ont préparé un buffet… gut, gut, gut.

Juste à côté du pupitre officiel, pour les discours officiels, l’affiche symbole de nos jeunes footballeurs, ein Adler sympa, un Coq rigolo, véritable clin d’œil de la génération 2010 à la génération d’avant, un peu comme si, dans cette salle de l’amitié, les chanteurs de Tokyo Hotel, et le Ribéry du Bayern, avant la teuf (la fête), chekaient (seraient les mains), Konrad AD et Charles 2G.

Apéritifs et sourires …zum Wohl, Prost….et nous partons dîner dans nos familles.

 

FREITAG

Frühstück mit Brötchen und Aufschnitt, mais aussi pain beurre confiture…1,2,3 Kaffee.

Freitag, früh am Rhein, BERNARD nous a dit Kreuzfahrt, INGE nous a dit Kultur, entre H. HEINE & V. HUGO…ouf !     Nous avons échappé à PÉTRARQUE… et, à la marche à pied.

Tous les Français (ou presque) avaient révisé HEINE : « Sois le bienvenu, oh Rhin ! Qu’es-tu devenu ? J’ai souvent songé à toi, impatient et nostalgique ». Tous les Allemands avaient révisé HUGO : « Der Rhein ist der Fluss, von dem alle Welt redet und den niemand studiert, den alle Welt besucht und niemand kennt »…

Embarquement, départ, échanges… Nous apprenons de nos amis que le saumon pendant près de 200 ans était l’or du Rhin. Bernard nous avait pourtant dit que Rheingold était un opéra de Wagner. De son côté, Hugo écrivait au début de ses 39 Lettres sur le Rhin « mystérieux comme le Nil et pailleté d’or comme les fleuves d’Amérique », et, dans sa lettre de St GOAR, HUGO parlant des filets du pêcheur en forme d’araignée écrivait : « on voit l’hideuse bête se soulever lentement, au milieu de laquelle saute et se tord un beau saumon d’argent » n’en déplaise à nos amis, pour HUGO Rheinlachs ist Silber, nicht Gold.

Sur le beau bateau de croisière que nous offraient nos amis en cette année de 30e anniversaire, nous étions devant un Kaffee-Kuchen quand, au beau milieu du fleuve, nous avons vu le Pfalzgrafenstein, superbe, indépendant, sorte de bateau blanc immobile au pied des collines vertes de KAUB.

Il était temps de boire un verre de Weißwein mit « Mineralwasser mit Gas » puisque nous arrivions à la LORELEI. Deux dames de la croisière, Françoise et Evelyn, chacune coiffée d’un joli chapeau, nous ont donné pendant un agréable moment, du HUGO, du HEINE. Certains n’étaient pas très attentifs, sans doute la crainte de voir nos 2 Amies devenir 2 Sirènes dans cet endroit où APOLLINAIRE, lui aussi, avait vu les cheveux blonds, et entendu le chant… HEINE nous disait à la fin de son texte sur la nymphe qui coulait les bateaux et donnait les marins aux tourbillons du Rhin : « Das hat mit ihrem Singen die LORELEI getan ».

Nous arrivons à ST GOAR, « entiers », après le rocher maléfique. Visite du château de Rheinfels. Une Dame en tenue médiévale nous guide. Elle nous apprend : que le château « war die bedeutenste Burg am Rhein, war der Mittelpunkt höfischer Kultur am Rhein, diente zunächst  den Grafen von KATZENELNBOGEN, später als Residenz   verschiedener Linien der Landgrafen von Hessen etc. » et, qu’en 1797 les soldats de la Révolution française l’on détruit… Silence chez les touristes… Heute sind (in der Ruine) ein Museum und ein Hotel … Sourire de retour chez les touristes.

Nous étions chez les « Katz », nous découvrons à PETERSECK le château des Erzbischöfe que les Katz appellent « die Maus », lustig les Katz… “ Die Maus”.. ist heute ein Adler- und Falkenhof, es ist nicht lustig.

Le soir venu, au moment de mettre pied à terre, un Français blaguait « Kölnischwasser ist Rheinwasser», l’historien économiste allemand pensait aux pirogues d’il y a 12 000 ans, au flottage du bois au temps des Romains, à l’acte de MANNHEIM de 1868, à la libre circulation sur le Rhin, aux 200 millions de tonnes naviguant chaque année de ROTTERDAM via Duisburg sur 200 000 bateaux.   HEINE les réunissait sans doute « … Gib dich zufrieden Vater Rhein, leb wohl, wir sehen uns wieder ».

  

SAMSTAG

Entre les GÄRTEN et la KERB

Un philosophe français a écrit « il faut cultiver notre jardin », nos amis de WACKERNHEIM le font avec soin.

Qu’il soit grand autour d’une construction neuve cossue, qu’il soit plus modeste en L autour d’une maison restaurée avec goût, qu’il soit en pente et potager dans la partie ancienne du village, le jardin donne du travail, du bien-être, et, nous a laissés sereins dans la rêverie d’une promenade collective durant la matinée des « grilles ouvertes ».

De retour à la Ville, la fin de matinée se voulait sous les auspices de l’Europe, avec quelques propos, sur nos passés joints par le malheur, le partage de nos cultures, de nos valeurs communes, d’un anniversaire fort de 30 années de fidélité.

Plus modestement, nous essayons peut-être entre nous, de traduire les mots Europe, amitié franco-allemande en 4 journées de rencontres, de découvertes, d’échanges, chaque année, pour construire des liens simples, de famille à Familie.

Finalement 20, 30 familles ensemble, c’est déjà un village, une communauté. Et puis là-bas, sur le stade, dans l’herbe, la pluie, le camping, autour du feu, du barbecue, les 30 à 40 gamins qui jouent au foot, même s’ils n’en parlent pas, ils sont l’Europe… Aller, un peu de Fest bitte !

 

Recette du mât de cocagne de la KERB :

Trouver un grand sapin bien droit qui devra quitter sa forêt pour terminer sa vie sur la place du village au milieu des habitants venus vérifier que la jeunesse est encore capable de relever des défis. Faire un trou profond sur la place de la Mairie pour y planter le sapin. Prévoir une fanfare ou de la musique, des tables pour déguster de la Wurst, du Rheinwein. Pour la Bier prévoir une fontaine bien fraîche à proximité de l’arbre. Prévoir la Feuerwehr prête à intervenir.

Pour que la Fête soit réussie, surtout, surtout, trouver un Élu, un Parlementaire capable de tomber la veste, la cravate, afin d’aider son peuple à relever un défi, relever un ARBRE.

Finalement, l’opération durera 3 heures, un délai Parlementaire exemplaire. Une fois de plus, le Bundestag montre à la France la voie en période de crise : le Parlementaire doit retrousser ses manches pour aider son peuple dans la difficulté, pour aider son peuple à redresser une situation.

« Arbre mât » en place … Après quelques tentatives le Jeune, der Junge n’y arrivera pas, il ne montera pas en haut du mât, un Ancien, ein Alter le fera. Dédale & Icare. L’arbre était vieux, il n’allait pas se laisser faire par un jeune. En quittant sa forêt, le grand sapin laissait pousser les jeunes plants. En montrant au Jeune comment grimper au mât, l’Ancien du village montrait le chemin pour prendre de la hauteur… Il faut parfois, souvent, être patient et, recommencer.  

La Fête, était aussi l’occasion des cadeaux réciproques de nos 2 Comités de Jumelage, et là, avec émotion, surprise et humour, nous étions tous assemblés au moment de l’ouverture des cadeaux... 2 plaques de signalisation DAIX 502 KMS, pointant dans des sens contraires comme pour dire à tous que depuis WACKERNHEIM …   « Tous les chemins mènent à DAIX ».

 

SONNTAG

Nous nous sommes levés tranquillement au lendemain d’une soirée très festive avec des Groupes de variétés, de rock, de jeunes, de plus anciens, avec de la danse pas tout à fait jusqu’au bout de la nuit, mais bien avancée dans la nuit.

Ce matin, c’est au Temple qu’est le rendez-vous.

Comme autrefois dans le village de ma Grand-Tante en Auvergne, nous sentons dans les maisons que certains s’affairent déjà entre cuisine, toilette et habillement, pour que cette journée de fête au Village, soit aussi, en ce dimanche, un moment de partage et de réflexion.

Nous marchons ensemble avec SYBILLE et ACHIM et montons vers le haut du bourg.

Se retrouve aujourd’hui, au Temple de WACKERNHEIM, une modeste partie du Peuple du Livre.

Dans cette Assemblée qui ne partage pas tout à fait les même pratiques, pas tout à fait les mêmes dogmes, se sont aussi réunis pour partager un temps de réflexion, des Hommes et des Femmes, qui dans le quotidien parlent des langues qui n’ont pas les mêmes accents, pas les mêmes syntaxes.

Un Prêtre Catholique, une Pasteure Protestante, l’un en allemand, l’autre en français nous donnent lectures et paroles. Le respect du lieu, le propos, induit ce matin une forme de silence en écho de nos rires de la fête d’hier, deux formes de partage et de communion.

Un Ami allemand qui vit en France depuis plus de 25 ans, qui est marié avec une Française, qui est complétement biculturel, me disait, que même après tout ce temps, il y avait une chose qu’il ne savait pas faire, qu’il ne pouvait pas faire en français, prier.

 

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Deux heures plus tard, nous nous embrassions, nous montions dans le bus en s’étant donné rendez-vous en 2013.

Dans 6 mois vous serez ici, en BOURGOGNE, à DAIX.

C’est bien. Ce sera le 09 Mai, c’est une bonne date.

 

 

Dominique GILLET